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TOMB OF DRACULA CHEZ MARVEL COMICS

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On a tendance à l’oublier, mais avant de voir ses licences adaptées à tour de bras au cinéma, Marvel Comics a longtemps appliqué l’exacte recette inverse en adaptant sur le papier les films du moment et autres classiques de la science-fiction ou du fantastique. Et parmi les nombreuses séries, parfois éphémères, qui verront le jour grâce à cette pratique, il en est une que les mordus de comic books n’ont pas oublié !

BEWARE ! BEWARE !

Le vampire est sans conteste l’une des figures les plus populaires de la fiction moderne. Des jeux de rôles se déroulant dans le Monde des Ténèbres, en passant par Castlevania, les romans d'Anne Rice, Buffy contre les Vampires, ou même Twilight, on pourrait littéralement passer la journée à énumérer les œuvres de la Pop Culture qui tournent autour du mythe de cette créature revenue d’entre les morts pour sucer le sang des vivants !

Le bestiaire folklorique et fantastique a toujours été une source d’inspiration pour les auteurs et, bien évidemment, le vampire n’y fait pas exception. Créature crépusculaire intimement liée aux croyances religieuses, le vampire moderne est une sorte de pot-pourri d’influences qui inspire crainte et fascination, pouvant se révéler tout aussi sournois que bestial, tout aussi séduisant qu’effrayant. Si des entités assimilables à des vampires existent dans pratiquement tous les folklores de la planète, c’est surtout à partir du dix-huitième siècle que l’image du vampire telle que nous la connaissons se propage dans la culture populaire. Se nourrissant principalement des légendes d’Europe Centrale, puis de récits fantastiques comme Le Vampire de John William Polidori, et bien entendu Dracula de Bram Stocker, le cliché du gentleman encapé sortant de son cercueil à la nuit tombée pour s’abreuver du sang de jeunes vierges sans défense n’a depuis lors plus jamais quitté l’imaginaire collectif.

Pour beaucoup d’entre nous, c’est justement Dracula, paru en 1897, qui reste la référence en matière d’histoire de vampire, même s'il est très probable que vous connaissiez mieux cette œuvre de Bram Stocker à travers son nombre incalculable d’adaptations que dans sa forme originale de roman. Et si Dracula a effectivement été adapté maintes fois au cinéma, il a bien plus souvent été plagié, transformé et détourné, que ce soit par des cinéastes peu scrupuleux voulant contourner les droits d’auteurs, ou par divers cartoons parodiant les gimmicks du Prince des Ténèbres.

Mais alors, comment le personnage de Dracula a fini par atterrir dans les pages d’une publication Marvel Comics ? Et bien disons qu’il s’agit de l’addition d’un heureux concours de circonstances et d’une bonne dose d’opportunisme.

J’ai déjà eu l’occasion d’en parler : à partir du milieu des années 1950, la censure s'abat sur la bande dessinée américaine par le biais du Comics Code Authority. Outre bon nombre de règles concernant le sexe, la nudité et la violence, le code interdit également les vampires, les loups-garous et autres morts-vivants qui pourraient donner des cauchemars aux enfants. Seulement, au début des années 1970, l’ambiance est plus détendue, les États-Unis changent, et le Code va connaître quelques assouplissements, notamment en ce qui concerne l’horreur. Les loups-garous et les vampires obtiennent de nouveau le droit d'apparaître dans les histoires, à condition d’être traitées de façon classique, tels qu’ils peuvent être représentés dans les romans de la littérature fantastique, qui sont alors considérés comme une forme de caution. Une règle assez absurde que les éditeurs vont s’empresser de tourner à leur avantage, à défaut de pouvoir ouvertement la contourner. Ainsi, à peine quelques mois après cette mise à jour du Code, Morbius apparaît dans les pages du cent-unième numéro de The Amazing Spider-Man. Surnommé “le Vampire-Vivant”, le personnage est déjà une forme de pied-de-nez au Comics Code, et son statut assez flou de super-vilain costumé victime de ses propres expériences lui permettra de passer assez facilement entre les mailles du filet de la censure.

Pour continuer à alimenter cette nouvelle vague horrifique permise par le relâchement des censeurs, Marvel ne va pas aller chercher bien loin. Puisque le Code réclame un traitement “classique” des monstres de fiction, pourquoi ne pas tout simplement aller chercher Dracula, le monstre de Frankenstein et le Loup-Garou, que tout le monde connaît grâce au cinéma, et qui ont l’avantage d’être tombés dans le domaine public quelques années plus tôt ? Un choix doublement économique, puisqu’en plus d’éviter un fastidieux processus de création pour donner vie à de nouveaux personnages, il évite également à Marvel d’avoir trop d’efforts à faire pour les promouvoir. À l’époque, les films de la Hammer avec pour vedette Dracula ou la créature de Frankenstein sont encore largement plébiscités par le public et ont même l’avantage d’adopter le fameux style d’horreur gothique attendu par le Comics Code Authority, pratiquement une aubaine pour la Maison des Idées qui va profiter de tout ça sans que ça ne lui coûte un centime en droits d’adaptation.

Si aujourd’hui, je me concentre sur la série Tomb of Dracula, il faut quand même souligner que l’éditeur va rapidement essorer le filon, puisqu’en seulement quelques mois, on va voir débarquer dans son catalogue le loup-garou Jack Russel, d’abord dans Marvel Spotlight, puis dans sa propre série Werewolf by Night, le monstre de Frankenstein, puis The Living Mummy dans les pages de Supernatural Thrillers, et enfin la Légion des Monstres, une équipe composée de plusieurs de ces créatures. Finalement, ce regain d’intérêt pour l’horreur dans les comic books aura permis à Marvel d’ajouter à moindre frais à son bestiaire une galerie de personnages exploitables à l’infini et dont les univers étendus respectifs auront un véritable impact sur le développement de son macrocosme : sans Werewolf by Night, pas de Moon Knight, par exemple.

RAINING BLOOD

Le premier numéro de Tomb of Dracula paraît à la fin de l’année 1971. Il est écrit par Gerry Conway et dessiné par Gene Colan qui œuvrera sur l’intégralité des 70 numéros, ce qui est assez rare pour être signalé. La composition de l’équipe créative variera légèrement durant les premiers mois de parution, voyant Archie Goodwin, puis Gardner Fox s’occuper de l’écriture, avant de se stabiliser au septième épisode avec l’arrivée du scénariste Marv Wolfman Parmi les autres acteurs majeurs de Tomb of Dracula, on pourra citer l’éditeur Roy Thomas et l’encreur Tom Palmer, dont les noms restent fortement liés au succès de la série.

Dans le premier épisode, on découvre Frank Drake, qui hérite d’une maison de famille assez particulière située en Transylvanie : le château du Comte Dracula en personne ! En effet, Frank est un descendant de Dracula et il va avoir la joie et l’honneur de rencontrer son aïeul, ramené à la vie accidentellement après un long sommeil. Le vampire s’empresse de boire le sang de Jeanie, la petite amie de Frank, et dès le numéro suivant, ce dernier n’aura pas d’autre choix que de tuer lui-même sa bien aimée transformée en créature de la nuit par la morsure du Comte. Des évènements dramatiques qui conduisent Frank à se lancer à la poursuite de son ancêtre suceur de sang. Une quête dans laquelle il sera bientôt rejoint par Rachel Van Helsing, elle-même descendante du célèbre chasseur de vampires, et par Blade, qui fait sa première apparition dans le dixième épisode de Tomb of Dracula.

L’univers du Dracula de Marvel s’étoffe rapidement, puisque le Comte trouvera des ennemis récurrents et même quelques alliés au fil de ses aventures, avant de devenir la vedette d’autres publications : d’abord avec le magazine en noir et blanc Dracula Lives ! en 1973, dont le format échappant au Comics Code Authority permettait aux auteurs d’aller plus loin dans l’horreur et la suggestivité, puis dans Giant-Size Chillers, rapidement renommé Giant-Size Dracula, dans lesquels Roy Thomas, Gene Colan et une longue liste d’auteurs enrichissent le background du vampire en prenant plus ou moins de liberté vis-à-vis du mythe original. En France, Tomb of Dracula a été publié chez Aredit, au même titre que Werewolf by Night ou Frankenstein, aux côtés d’autres personnages comme Swamp Thing et The Demon de Jack Kirby, dans la collection Comics Pocket. Des périodiques estampillés “Bandes dessinées pour adultes” qui, entre censure et redécoupage pour faire s’harmoniser les planches originales au petit format des revues, ne faisaient pas toujours honneur au matériau d’origine, il faut l’avouer.

L’une des particularités de la version de Dracula à laquelle nous nous intéressons aujourd’hui est d’avoir été complètement intégrée à l’univers Marvel, obtenant une place à part entière au sein de la Maison des Idées. Sans surprise, le Prince des Ténèbres va donc croiser et affronter Jack Russell, alias Werewolf by Night, mais aussi toute la galerie des héros Marvel dont l’exotisme tranche un peu plus avec sa Transylvanie natale, de l’Homme Araignée dans le premier numéro de Giant-Size Spider-Man en 1974 au Silver Surfer dans le cinquantième numéro de Tomb of Dracula… L’arrêt de la série en 1979, après soixante-dix numéros, est de courte durée. Seulement quelques semaines plus tard, Tomb of Dracula revient dans un format magazine sous le label Curtis de Marvel, échappant encore une fois à la censure. Le personnage est ensuite régulièrement utilisé par Marvel, comme dans les pages de Thor et Docteur Strange, puis en 1991 sous le label Epic, et jusqu’à récemment dans les pages de Deadpool ou de certaines séries mutantes de la Maison des Idées, dans une version correspondant mieux à l’air du temps.

Évidemment, je ne survole ici que les utilisations de Dracula par Marvel, le Prince des Ténèbres ayant été largement exploité par divers éditeurs au fil des années dans des productions plus ou moins romanesques, comme le lunaire Dracula versus Zorro chez Topps en 1993, ou Superman vs Dracula en 2002 chez DC Comics… Plus curieux encore, en 1980, Tomb of Dracula sera adapté en film d’animation pour la télévision par la société japonaise Toei. Un long-métrage de quatre-vingt dix minutes qui s’inspire des grandes lignes de la série de comic books et qui ne présente pas d’autre intérêt que d’être un honnête OVNI parmi les nombreuses adaptations tirées des publications Marvel Comics.

Si l’intrigue de Tomb of Dracula a tendance à se répéter et que certains retournements de situation, tels que les multiples résurrections de Dracula, sont un peu tirés par la cape, l’un des principaux attraits de la série reste incontestablement l’évolution du personnage titre, à la fois antagoniste et élément central des histoires racontées. Après un premier arc très classique, fidèle aux clichés des histoires de vampires telles que l’on peut les voir au cinéma, on sent que Wolfman et Colan se réorientent peu à peu vers une recette plus proche des productions habituelles de Marvel. Dracula devient, tant bien que mal, le héros de sa propre histoire et doit faire face à des menaces qui remettent en cause son statut de prédateur ultime, tout en continuant à échapper aux chasseurs de vampires qui en ont après lui depuis des siècles. Si on ne s’attache pas vraiment à Dracula, qui reste prêt à tout, y compris à tuer, pour arriver à ses fins, on vibre tout de même au rythme de ses aventures.

Un programme riche en évènements improbables qui n’accuse pourtant que très peu le poids des années, sûrement parce que l’ambiance originale de la série, nourrie des classiques horrifiques du dix-neuvième siècle, entretient la crédibilité d’un univers fantastique hors du temps pouvant se permettre de prendre quelques libertés en matière de cohérence sans jamais tomber dans le ridicule. Finalement, cette adaptation à la sauce Marvel rejoint sans difficulté la très longue liste des œuvres exploitant l’inépuisable filon Dracula tous supports confondus, en y ajoutant un aspect sériel et un point de vue quasi super-héroïque typique de la bande dessinée américaine. Tomb of Dracula n’est clairement pas le premier comic book auquel on pense, et encore moins la première série Marvel qui vient à l’esprit, mais elle conserve un véritable intérêt patrimonial tant dans sa conception que dans son contenu.

C’est pour cela que je ne peux que vous recommander la lecture des omnibus parus chez Panini Comics, volumes imposants et de grande qualité, dont l’existence est à saluer tant ils jouent un rôle dans la représentation de la diversité de la bande dessinée américaine sur le marché français.

Et si vous cherchez un point d’accès à moindre coût, le volume de la collection Marvel Décennies consacré aux années 1970 et à la Légion des Monstres vous permettra d’appréhender plus globalement le traitement de l’horreur chez Marvel à l’époque.

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BEWARE ! BEWARE !

Le vampire est sans conteste l’une des figures les plus populaires de la fiction moderne. Des jeux de rôles se déroulant dans le Monde des Ténèbres, en passant par Castlevania, les romans d'Anne Rice, Buffy contre les Vampires, ou même Twilight, on pourrait littéralement passer la journée à énumérer les œuvres de la Pop Culture qui tournent autour du mythe de cette créature revenue d’entre les morts pour sucer le sang des vivants !

Le bestiaire folklorique et fantastique a toujours été une source d’inspiration pour les auteurs et, bien évidemment, le vampire n’y fait pas exception. Créature crépusculaire intimement liée aux croyances religieuses, le vampire moderne est une sorte de pot-pourri d’influences qui inspire crainte et fascination, pouvant se révéler tout aussi sournois que bestial, tout aussi séduisant qu’effrayant. Si des entités assimilables à des vampires existent dans pratiquement tous les folklores de la planète, c’est surtout à partir du dix-huitième siècle que l’image du vampire telle que nous la connaissons se propage dans la culture populaire. Se nourrissant principalement des légendes d’Europe Centrale, puis de récits fantastiques comme Le Vampire de John William Polidori, et bien entendu Dracula de Bram Stocker, le cliché du gentleman encapé sortant de son cercueil à la nuit tombée pour s’abreuver du sang de jeunes vierges sans défense n’a depuis lors plus jamais quitté l’imaginaire collectif.

Pour beaucoup d’entre nous, c’est justement Dracula, paru en 1897, qui reste la référence en matière d’histoire de vampire, même s'il est très probable que vous connaissiez mieux cette œuvre de Bram Stocker à travers son nombre incalculable d’adaptations que dans sa forme originale de roman. Et si Dracula a effectivement été adapté maintes fois au cinéma, il a bien plus souvent été plagié, transformé et détourné, que ce soit par des cinéastes peu scrupuleux voulant contourner les droits d’auteurs, ou par divers cartoons parodiant les gimmicks du Prince des Ténèbres.

Mais alors, comment le personnage de Dracula a fini par atterrir dans les pages d’une publication Marvel Comics ? Et bien disons qu’il s’agit de l’addition d’un heureux concours de circonstances et d’une bonne dose d’opportunisme.

J’ai déjà eu l’occasion d’en parler : à partir du milieu des années 1950, la censure s'abat sur la bande dessinée américaine par le biais du Comics Code Authority. Outre bon nombre de règles concernant le sexe, la nudité et la violence, le code interdit également les vampires, les loups-garous et autres morts-vivants qui pourraient donner des cauchemars aux enfants. Seulement, au début des années 1970, l’ambiance est plus détendue, les États-Unis changent, et le Code va connaître quelques assouplissements, notamment en ce qui concerne l’horreur. Les loups-garous et les vampires obtiennent de nouveau le droit d'apparaître dans les histoires, à condition d’être traitées de façon classique, tels qu’ils peuvent être représentés dans les romans de la littérature fantastique, qui sont alors considérés comme une forme de caution. Une règle assez absurde que les éditeurs vont s’empresser de tourner à leur avantage, à défaut de pouvoir ouvertement la contourner. Ainsi, à peine quelques mois après cette mise à jour du Code, Morbius apparaît dans les pages du cent-unième numéro de The Amazing Spider-Man. Surnommé “le Vampire-Vivant”, le personnage est déjà une forme de pied-de-nez au Comics Code, et son statut assez flou de super-vilain costumé victime de ses propres expériences lui permettra de passer assez facilement entre les mailles du filet de la censure.

Pour continuer à alimenter cette nouvelle vague horrifique permise par le relâchement des censeurs, Marvel ne va pas aller chercher bien loin. Puisque le Code réclame un traitement “classique” des monstres de fiction, pourquoi ne pas tout simplement aller chercher Dracula, le monstre de Frankenstein et le Loup-Garou, que tout le monde connaît grâce au cinéma, et qui ont l’avantage d’être tombés dans le domaine public quelques années plus tôt ? Un choix doublement économique, puisqu’en plus d’éviter un fastidieux processus de création pour donner vie à de nouveaux personnages, il évite également à Marvel d’avoir trop d’efforts à faire pour les promouvoir. À l’époque, les films de la Hammer avec pour vedette Dracula ou la créature de Frankenstein sont encore largement plébiscités par le public et ont même l’avantage d’adopter le fameux style d’horreur gothique attendu par le Comics Code Authority, pratiquement une aubaine pour la Maison des Idées qui va profiter de tout ça sans que ça ne lui coûte un centime en droits d’adaptation.

Si aujourd’hui, je me concentre sur la série Tomb of Dracula, il faut quand même souligner que l’éditeur va rapidement essorer le filon, puisqu’en seulement quelques mois, on va voir débarquer dans son catalogue le loup-garou Jack Russel, d’abord dans Marvel Spotlight, puis dans sa propre série Werewolf by Night, le monstre de Frankenstein, puis The Living Mummy dans les pages de Supernatural Thrillers, et enfin la Légion des Monstres, une équipe composée de plusieurs de ces créatures. Finalement, ce regain d’intérêt pour l’horreur dans les comic books aura permis à Marvel d’ajouter à moindre frais à son bestiaire une galerie de personnages exploitables à l’infini et dont les univers étendus respectifs auront un véritable impact sur le développement de son macrocosme : sans Werewolf by Night, pas de Moon Knight, par exemple.

RAINING BLOOD

Le premier numéro de Tomb of Dracula paraît à la fin de l’année 1971. Il est écrit par Gerry Conway et dessiné par Gene Colan qui œuvrera sur l’intégralité des 70 numéros, ce qui est assez rare pour être signalé. La composition de l’équipe créative variera légèrement durant les premiers mois de parution, voyant Archie Goodwin, puis Gardner Fox s’occuper de l’écriture, avant de se stabiliser au septième épisode avec l’arrivée du scénariste Marv Wolfman Parmi les autres acteurs majeurs de Tomb of Dracula, on pourra citer l’éditeur Roy Thomas et l’encreur Tom Palmer, dont les noms restent fortement liés au succès de la série.

Dans le premier épisode, on découvre Frank Drake, qui hérite d’une maison de famille assez particulière située en Transylvanie : le château du Comte Dracula en personne ! En effet, Frank est un descendant de Dracula et il va avoir la joie et l’honneur de rencontrer son aïeul, ramené à la vie accidentellement après un long sommeil. Le vampire s’empresse de boire le sang de Jeanie, la petite amie de Frank, et dès le numéro suivant, ce dernier n’aura pas d’autre choix que de tuer lui-même sa bien aimée transformée en créature de la nuit par la morsure du Comte. Des évènements dramatiques qui conduisent Frank à se lancer à la poursuite de son ancêtre suceur de sang. Une quête dans laquelle il sera bientôt rejoint par Rachel Van Helsing, elle-même descendante du célèbre chasseur de vampires, et par Blade, qui fait sa première apparition dans le dixième épisode de Tomb of Dracula.

L’univers du Dracula de Marvel s’étoffe rapidement, puisque le Comte trouvera des ennemis récurrents et même quelques alliés au fil de ses aventures, avant de devenir la vedette d’autres publications : d’abord avec le magazine en noir et blanc Dracula Lives ! en 1973, dont le format échappant au Comics Code Authority permettait aux auteurs d’aller plus loin dans l’horreur et la suggestivité, puis dans Giant-Size Chillers, rapidement renommé Giant-Size Dracula, dans lesquels Roy Thomas, Gene Colan et une longue liste d’auteurs enrichissent le background du vampire en prenant plus ou moins de liberté vis-à-vis du mythe original. En France, Tomb of Dracula a été publié chez Aredit, au même titre que Werewolf by Night ou Frankenstein, aux côtés d’autres personnages comme Swamp Thing et The Demon de Jack Kirby, dans la collection Comics Pocket. Des périodiques estampillés “Bandes dessinées pour adultes” qui, entre censure et redécoupage pour faire s’harmoniser les planches originales au petit format des revues, ne faisaient pas toujours honneur au matériau d’origine, il faut l’avouer.

L’une des particularités de la version de Dracula à laquelle nous nous intéressons aujourd’hui est d’avoir été complètement intégrée à l’univers Marvel, obtenant une place à part entière au sein de la Maison des Idées. Sans surprise, le Prince des Ténèbres va donc croiser et affronter Jack Russell, alias Werewolf by Night, mais aussi toute la galerie des héros Marvel dont l’exotisme tranche un peu plus avec sa Transylvanie natale, de l’Homme Araignée dans le premier numéro de Giant-Size Spider-Man en 1974 au Silver Surfer dans le cinquantième numéro de Tomb of Dracula… L’arrêt de la série en 1979, après soixante-dix numéros, est de courte durée. Seulement quelques semaines plus tard, Tomb of Dracula revient dans un format magazine sous le label Curtis de Marvel, échappant encore une fois à la censure. Le personnage est ensuite régulièrement utilisé par Marvel, comme dans les pages de Thor et Docteur Strange, puis en 1991 sous le label Epic, et jusqu’à récemment dans les pages de Deadpool ou de certaines séries mutantes de la Maison des Idées, dans une version correspondant mieux à l’air du temps.

Évidemment, je ne survole ici que les utilisations de Dracula par Marvel, le Prince des Ténèbres ayant été largement exploité par divers éditeurs au fil des années dans des productions plus ou moins romanesques, comme le lunaire Dracula versus Zorro chez Topps en 1993, ou Superman vs Dracula en 2002 chez DC Comics… Plus curieux encore, en 1980, Tomb of Dracula sera adapté en film d’animation pour la télévision par la société japonaise Toei. Un long-métrage de quatre-vingt dix minutes qui s’inspire des grandes lignes de la série de comic books et qui ne présente pas d’autre intérêt que d’être un honnête OVNI parmi les nombreuses adaptations tirées des publications Marvel Comics.

Si l’intrigue de Tomb of Dracula a tendance à se répéter et que certains retournements de situation, tels que les multiples résurrections de Dracula, sont un peu tirés par la cape, l’un des principaux attraits de la série reste incontestablement l’évolution du personnage titre, à la fois antagoniste et élément central des histoires racontées. Après un premier arc très classique, fidèle aux clichés des histoires de vampires telles que l’on peut les voir au cinéma, on sent que Wolfman et Colan se réorientent peu à peu vers une recette plus proche des productions habituelles de Marvel. Dracula devient, tant bien que mal, le héros de sa propre histoire et doit faire face à des menaces qui remettent en cause son statut de prédateur ultime, tout en continuant à échapper aux chasseurs de vampires qui en ont après lui depuis des siècles. Si on ne s’attache pas vraiment à Dracula, qui reste prêt à tout, y compris à tuer, pour arriver à ses fins, on vibre tout de même au rythme de ses aventures.

Un programme riche en évènements improbables qui n’accuse pourtant que très peu le poids des années, sûrement parce que l’ambiance originale de la série, nourrie des classiques horrifiques du dix-neuvième siècle, entretient la crédibilité d’un univers fantastique hors du temps pouvant se permettre de prendre quelques libertés en matière de cohérence sans jamais tomber dans le ridicule. Finalement, cette adaptation à la sauce Marvel rejoint sans difficulté la très longue liste des œuvres exploitant l’inépuisable filon Dracula tous supports confondus, en y ajoutant un aspect sériel et un point de vue quasi super-héroïque typique de la bande dessinée américaine. Tomb of Dracula n’est clairement pas le premier comic book auquel on pense, et encore moins la première série Marvel qui vient à l’esprit, mais elle conserve un véritable intérêt patrimonial tant dans sa conception que dans son contenu.

C’est pour cela que je ne peux que vous recommander la lecture des omnibus parus chez Panini Comics, volumes imposants et de grande qualité, dont l’existence est à saluer tant ils jouent un rôle dans la représentation de la diversité de la bande dessinée américaine sur le marché français.

Et si vous cherchez un point d’accès à moindre coût, le volume de la collection Marvel Décennies consacré aux années 1970 et à la Légion des Monstres vous permettra d’appréhender plus globalement le traitement de l’horreur chez Marvel à l’époque.

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